vendredi 2 avril 2010

LA PORTE DE LA VILLETTE vue par Samuel

Mon approche de la porte de la Villette s'est construite sur un socle ayant pour matière le passé. Mon passé. Mes impressions d'aujourd'hui ne peuvent se défaire de celles de mon enfance, la cité des Sciences en étant l'un des lieux récurrents : c'est par elle que je découvrais la porte de la Villette.

Je me souviens avoir joué des dimanches après-midis entiers sur l’immense toboggan en forme de dragon ; en fin de journée, nous allions avec ma mère et ma sœur boire un chocolat chaud dans un des cafés qui longent l’avenue Corentin Cariou. Puis les joues encore rouges et les jambes lourdes nous rentrions non loin de là, à Barbès, la tête pleine de souvenirs et d’appréhension car le départ de la Porte de la Villette signifiait aussi pour moi la fin du week-end.

C'est donc envahi par des impressions Proustiennes que commençait ma nouvelle rencontre avec cette porte. Et, comme par un magnétisme étrange dicté par mon enfance, je me suis donc dans un premier temps dirigé vers la Cité des sciences, à la recherche de ce qui faisait la magie de cet endroit et de mes souvenirs. Or la magie des lieux disparaît aussi vite que disparaît la magie de l’enfance.

Attiré par une réalité autre que celle un peu trop naïve de la jeunesse, j’ai décidé de me retirer de la cité des sciences, pour me diriger vers le métro. Ici ce qui m'a le plus sauté aux yeux, ce sont les travaux. Ceux-ci s’engagent sur toute la longueur du Boulevard Mac Donald et annoncent un bouleversement du paysage actuel. En marge de ces travaux, des panneaux affichent une image numérique largement embellie, celle de la future porte. Au programme, verdure et transports écologiques prendront la place de la grisaille des murs et de la pollution occasionnée par le va-et-vient ininterrompu des voitures.

En attendant, les murs du périphérique suintent l'humidité ambiante et un liquide ocre est vomi par ces imposants murs-frontières. Les rails de la petite ceinture sont entièrement investis par la peinture colorée des graffeurs noctambules. Tandis que la nuit, l'oeil est piégé, comme le serait un insecte, par l'éclatante luminescence des lumières de la pub-ville.

Une foule fuyante et discrète traverse la porte de la Villette. Familles nombreuses, barmen, bouchers de l’Avenue Corentin Cariou, musiciens du GlaZ’art, employés des grandes entreprises locataires de la tour Daewoo, ouvriers acteurs du changement morphologique du quartier, Sans-abris qui attendent en grelottant de froid l’arrivée du bus qui doit les conduire dans le foyer d’hébergement de Nanterre, toxicomanes en pleine errance hallucinatoire, familles de gens du voyage portant d’énormes cabas… Tous se croisent et ne se regardent pas aux abords de la porte de la Villette.

Samuel Dessons

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